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Algérie : Barakat ! Halte à la torture. Pour que justice soit faite

dimanche 7 février 2021

Walid Nekiche, quitte la prison d’El Harrach après 432 jours de détention arbitraire, ainsi que son co-détenu kamel Bensaad.

Les révélations innommables du jeune étudiant Walid Nekiche et le verdict requis par le procureur, qui s’en est suivi, ont glacé les âmes et les cœurs présents au niveau de la salle d’audience, en ce jour du premier février 2021, à quelques jours de la date anniversaire du soulèvement populaire du 22 février 2019, le Hirak, où le peuple algérien est sorti pour exiger - entre autres - sa citoyenneté et sa dignité : El karama.
Ces révélations ont rapidement traversé les murs du tribunal criminel de Dar El Beida, suscitant l’émoi au sein de la population et des condamnations de toute part via la toile et la presse écrite.

Les membres du Comité National de Libération des Détenus, et de la Coordination Nationale des Universitaires Algériens pour le Changement ne peuvent rester en marge de cette dynamique qui dénonce la « torture » et la « normalisation de la violence » qui tendent à prendre des proportions alarmantes.

La justice algérienne, aujourd’hui, perpétue les mêmes pratiques, qui rappellent les périodes les plus sombres de notre histoire. Elle apparaît comme un instrument aux mains d’un Pouvoir politique qui a tourné le dos à l’éthique et au Droit. Depuis que le Pouvoir illégitime a décidé de réprimer le Hirak qui revendique la souveraineté populaire sur l’Etat et ses appareils, des centaines de procès se sont succédé.

Les conditions d’arrestation et d’incarcération ainsi que les procédures juridiques continuent d’être gravement transgressées, faisant fi des conventions internationales ratifiées par l’Algérie.

Le cas de Walid Nekiche n’est que le énième cas, des comportements inadmissibles des services de sécurité et de la Justice. Es-ce le sort désormais réservé à la jeunesse algérienne ?

Pour rappel, Walid Nekiche, a été arrêté le 26 novembre 2019. Il disparaît pendant 6 jours, le 2 décembre les avocats le découvrent à El-Harrach. Ses proches n’ont pas été informés et sont restés sans nouvelles pendant toute cette période. C’est dans les geôles obscures, clandestines et, donc fonctionnant hors de toute légalité que Walid a subi violences et tortures. Son avocate, Nacera Haddouche, du barreau de Tizi-Ouzou et membre du collectif des avocats du Hirak, avait déposé, en juillet 2020, une plainte auprès du Parquet d’Alger pour dénoncer les sévices qu’il a subis. Cette dernière est restée sans suite, à ce jour. Comme a, d’ailleurs, été rejetée la demande d’expertise médicale déposée par cette dernière.
Face à ce mutisme coupable Walid Nekiche a eu le courage et la force - face à sa juge - de dire ces mots lors de l’audience : « J’ai subi des violences physiques et sexuelles ». Ce cri d’alarme marque un tournant pour la justice algérienne mise au banc des accusés. Nous ne pouvons que saluer le courage et la dignité de ce jeune étudiant, il est pratiquement le seul détenu à avoir brisé l’omerta en déposant plainte contre ses tortionnaires qui sévissent en toute impunité.
Walid Nekiche a subi des préjudices moraux et corporels inacceptables de la part des services de sécurité. Ils ont abusé de la loi, piétiné toute morale et arraché des supposés « aveux » par l’usage de violence extrême, en violation de l’article 15 de la convention internationale ratifiée par l’Algérie.
Les tortionnaires doivent être identifiés et extirpés du corps de l’Etat qu’ils déshonorent. C’est un truisme de dire, aujourd’hui, que d’autres abus ont été signalés par le passé. Nous ferons tout pour que la vérité éclate, que tous les dépassements soient identifiés et que les responsables et les acteurs de ces actes ignobles rendent des comptes devant la Justice.
Le cas de Walid Nekiche doit interpeller toutes les personnes qui militent pour un changement radical du système et pour l’instauration d’un Etat de droit et d’une justice indépendante. L’affaire Nekiche ne doit surtout pas s’arrêter là, juste avec sa sortie de prison. Un comité contre la torture doit être constitué afin que jamais plus….
La mémoire historique est toujours vivante pour nous rappeler le sacrifice de nos Chouhadas morts sous la torture de l’Etat colonial. Nous interpellons l’opinion publique, la conscience nationale, ainsi que toutes celles et ceux qui aspirent à une Algérie émancipée de la hogra et de l’arbitraire de réagir, de s’indigner, de dénoncer tous les responsables de ces actes barbares.
Walid Nekiche a clairement dit à sa sortie de prison « Ulac Smah Ulac ! » Nous aussi, nous ne pardonnons pas ! Ceux qui ont abusé de leur fonction, piétiné lois et procédures, violenté morale et éthique, en usant de tortures physiques et sexuelles envers Walid Nekiche, ou tout autre détenu, doivent aujourd’hui rendre des comptes.
Nous devons tous réagir ! Indignons-nous !

Nous, universitaires, avocats, militants engagés pacifiquement dans la révolution populaire et le combat démocratique, refusons de nous taire. Le silence est mortel. La conscience d’une Nation ne peut-être la propriété de ceux qui font de la torture un acte légitime.

Nous exigeons la libération immédiate et inconditionnelle de tous les détenus du Hirak, leur réhabilitation et l’arrêt de toutes les poursuites judiciaires à leur encontre.
Enfin, nous rendons un hommage à tous les avocats du collectif de la défense des détenus, mobilisés et engagés bénévolement depuis le début du Hirak.
L’histoire retiendra vos noms.
Le 4 février 2021

Les signataires
Comité National de Libération des Détenus.
Coordination Nationale des Universitaires Algériens pour le Changement.