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Le scandale du tweet de l’ambassade d’Israël adressé à madame la Maire de Strasbourg

dimanche 18 avril 2021

Lettre ouverte au Ministre des affaires étrangères du conseil d’administration de l’Association France Palestine Solidarité Alsace

Une ingérence insupportable de l’ambassade d’Israël dans la vie politique des collectvités territoriales

Monsieur Jean-Yves Le Drian,
Ministre de l’Europe et des Affaires étrangères
37, Quai d’Orsay
75351 Paris Cedex 07

Colmar, le 13 avril 2021

Monsieur le Ministre,

Monsieur Daniel Saada, ministre plénipotentiaire de l’Ambassade d’Israël en France, ambassadeur adjoint d’Israël en France depuis août 2019 et ayant rang personnel d’Ambassadeur, a signé en sa qualité de chargé d’Affaires par intérim de l’ambassade une lettre ouverte étonnante en date du 23 mars à l’adresse de Madame la Maire de Strasbourg.

Il y affirme qu’il n’est pas d’usage qu’un chef de mission diplomatique « porte un jugement sur les délibérations souveraines des instances des pouvoirs locaux » d’un pays, ce qu’on ne saurait contester.

Le rejet par le Conseil municipal de Strasbourg d’un texte « tout simple » reprenant la définition opérationnelle de l’antisémitisme établie par l’Alliance Internationale pour la mémoire de l’Holocauste (IHRA) a pourtant motivé son initiative.

Monsieur Saada précise dans cette lettre ouverte le décompte des voix des conseillers municipaux ayant soutenu ce rejet, dont celle de Madame la Maire, qui sont donc accusées d’avoir « émis un message de faillite morale » et de faiblesse dans la lutte contre l’antisémitisme sous toutes ses formes, dont l’antisionisme est présenté comme « une forme perverse ». Il y demande que la municipalité de Strasbourg « corrige cet écart ».

Cette utilisation de la définition IHRA, absolument contestable et par ailleurs rejetée par une bonne part du Parlement de notre République, vient aussi d’être dénoncée par nombre d’intellectuels spécialisés dans l’étude de l’Holocauste dans leur déclaration récente dite « de Jérusalem ».

Nous pourrions rappeler également qu’au sommet des maires contre l’antisémitisme du 16 mars 2021 Madame la Maire d’Amsterdam a déclaré que critique de l’État d’Israël et antisémitisme ne sont pas la même chose et que leur assimilation blesse profondément les personnes qui ont connu l’horreur d’une véritable discrimination.

Ce qui nous surprend et surtout nous désole est l’absence de réaction de votre part dans ce cas d’ingérence étrangère grossière et directe d’un État dans les délibérations d’une Collectivité locale française. Faut-il vous rappeler l’écho donné à cette affaire par des médias israéliens ?

Cette ingérence s’inscrit bien évidemment dans l’offensive systématique d’un gouvernement israélien à la recherche d’argumentaires pour dissimuler la réalité de sa politique coloniale et répressive en Palestine - susceptible de relever de la catégorie des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité au sens du Statut de Rome et de la Cour Pénale internationale, faut - il le rappeler ? -, réalité dont l’actualité rappelle tous les jours les exactions commises et la dureté de la répression contre les hommes, les femmes et les enfants palestiniens.

La duplicité habituelle de la politique française et de sa diplomatie actuelle dans son soutien fort théorique aux acquis du droit international, voire aux normes du simple droit humanitaire dès lors qu’il s’agit de la politique israélienne, pourra donc être qualifiée de complicité active si elle atteint désormais ce degré de complaisance.

Monsieur Daniel Saada enjoint Madame la Maire de Strasbourg de « mettre les mots sur les maux » pour contribuer à « sauver l’humanité », en s’alignant rapidement sur les demandes pressantes de l’ambassade israélienne de bien vouloir adopter cette définition de l’IHRA pour « bannir l’antisémitisme sous toutes ses formes ».

Nous croyons bien comprendre le sens des mots mais aussi les maux que sont amalgames et tentatives d’intimidation pour éviter la critique de la politique d’un État.
Monsieur le Ministre, la fidélité de votre politique aux valeurs fondamentales de notre pays est en question et nos libertés publiques mêmes pourraient être affectées par ces ingérences. Nous savons qu’elles se mutiplient et que nombre de nos Collectivités locales sont et seront concernées.

Nous ne sommes pas l’humanité et sommes plus modestes que Monsieur Saada.
Militants pour la reconnaissance des droits du peuple palestinien, certains d’entre nous ont eu des parents détenus au camp du Struthof (KL - Natzweiler), camp de concentration en Alsace annexée où ont péri près de 22 000 déportés au gré des décisions de l’administration nazie, dont 86 d’entre eux, juifs, ont été gazés, leurs squelettes étant destinés aux « études médicales » du professeur August Hirt, directeur de l’Université du Reich de Strasbourg.
Résolument opposés à tout racisme, donc à l’antisémitisme, nous vous demandons respectueusement de bien vouloir simplement et fermement rappeler à Monsieur Saada qu’il n’est pas à Strasbourg, en Alsace, en France, dans une colonie israélienne de peuplement située dans les Territoires palestiniens occupés.

Nous vous assurons, Monsieur le Ministre, de nos respectueuses salutations.

Le Conseil d’administration de l’Association France Palestine Solidarité Alsace.

AFPS Alsace
BP 70436
68007 COLMAR
afps.alsace.solidarite chez gmail.com

Le tweet en question