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Loi de 1905 : système de libertés ou catalogue d’interdits ?

mardi 1er juin 2021

Dans l’esprit de ceux qui ont conçu la loi de 1905, les croyants ne devaient pas nuire à la liberté des non-croyants et les non-croyants à celle des croyants. Aristide Briand affirmait aussi à l’époque que l’État n’avait pas à se soucier de l’éventuelle signification religieuse d’un habit. La laïcité est donc un principe juridique permettant la liberté de conscience et la neutralité religieuse de l’État et le libre exercice des cultes.

Des interprétations inquiétantes apparaissent dès les années 1990. La laïcité se transfome petit à petit en un ensemble de valeurs.

Au lieu d’être un principe émancipateur, cette nouvelle laïcité impose des normes, surtout vestimentaires. Des injonctions à l’assimilation et à la non-visibilité dans l’espace public apparaissent avec les interdits concernant les vêtements des femmes sur des territoires de plus en plus nombreux. Pour être un citoyen français à part entière, un musulman (et surtout une musulmane !) ne doit pas être “visible”.
Au lieu d’être un principe juridique permettant la liberté de conscience, la laïcité revue et corrigée impose sa vision de la société. Il n’est plus demandé de “respecter la laïcité” mais “d’adhérer à la laïcité”.

Au lieu d’être une “laïcité inclusive”, elle est devenue une “machine à exclure”. Depuis l’assassinat de Samuel Paty, la dérive s’est accélérée. Une “laïcité de sécurité et répressive” s’est mise en place sous prétexte de combattre le terrorisme et le radicalisme religieux, avec un contrôle des cultes et une diminution des libertés. Mais on a oublié que ce n’était pas du tout l’objet de la loi de 1905.

Pas étonnant que, dans ces conditions, l’État veuille faire disparaître l’Observatoire de la Laïcité. Cet Observatoire défendait une “laïcité apaisée”, il prônait la loi de 1905, rien que la loi de 1905 et il se définissait comme “un service public de la laïcité”. Les formations à la laïcité qu’il réalisait auprès de différents organismes, publics ou privés, ne pouvaient que déplaire. On le jugeait “trop laxiste” !

Pas étonnant encore ce lancement des “États Généraux de la Laïcité” avec des participants annoncés tous partisans d’une “laïcité intransigeante”.
L’Observatoire de la Laïcité aurait été, pourtant, l’instance qualifiée pour mener les débats.

Pas étonnant non plus que le gouvernement propose un projet de “loi confortant le respect des principes de la République...” piétinant encore davantage cette loi de 1905.

Pourra-t-on encore parler de la séparation entre les Églises et l’État puisque les associations cultuelles seront soumises à une autorisation administrative à la place d’une simple déclaration ? L’obtention de subventions pour une association sera conditionnée par la signature d’un “contrat d’engagement républicain”.

Avec cette volonté de réformer la laïcité, le gouvernement rompt avec les fondamentaux de la loi de 1905, pourtant brandie comme un totem.

Rappelons qu’Emmanuel Macron avait affirmé en 2017 avant d’être élu : “J’essaie d’être exactement dans le droit fil de la laïcité de 1905”. Le pouvoir rendrait-il amnésique ?

Françoise MAHE