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Nations Unies - Assemblée générale - 1er octobre 2024 - Situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967

jeudi 31 octobre 2024

Rapport de la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, Francesca Albanese

https://www.ohchr.org/fr/documents/country-reports/a79384-report-special-rapporteur-situation-human-rights-palestinian

L’effacement colonial par le génocide

Résumé

Dans le présent rapport, la Rapporteuse spéciale sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, Francesca Albanese, examine les horreurs qui se produisent dans le territoire palestinien occupé. La destruction systématique de Gaza se poursuit sans relâche, et d’autres régions du territoire ne sont pas non plus épargnées. La violence qu’Israël déchaîne contre les Palestiniens depuis l’après-7 octobre ne surgit pas du néant, mais s’inscrit dans une campagne orchestrée intentionnellement au niveau de l’État pour provoquer systématiquement le déplacement forcé et le remplacement à long terme des Palestiniens. Cette trajectoire risque de causer un tort irréparable à l’existence même du peuple palestinien en Palestine.

Les États Membres doivent intervenir maintenant pour empêcher de nouvelles atrocités qui laisseront des stigmates encore plus profonds dans l’histoire de l’humanité.

VII. Conclusions

l’objectif du « Grand Israël » menace d’effacer la population palestinienne autochtone.

84. Grimée sous les fards d’une propagande israélienne mensongère de guerre menée en « légitime défense », la conduite génocidaire d’Israël doit être xaminée dans un contexte plus large, entendue comme des actes multiples (totalité de la conduite) qui convergent tous vers la prise pour cible des Palestiniens comme tels (totalité d’un peuple) sur l’ensemble du territoire où ils habitent (totalité du territoire), au service des ambitions politiques d’Israël consistant à asseoir une souveraineté sur l’ensemble de l’ancienne Palestine mandataire. Aujourd’hui, le génocide de la population palestinienne apparaît comme le moyen de parvenir à une fin : l’expulsion complète ou l’éradication des Palestiniens de la terre à laquelle est rattachée une part si essentielle de leur identité et qui est illégalement et ouvertement convoitée par Israël.

85. Les déclarations et les actes des dirigeants israéliens traduisent une intention et une ligne de conduite génocidaires ; ils ont souvent convoqué le récit biblique d’Amalek pour justifier l’extermination des « Gazaouis », en effaçant Gaza et en déplaçant violemment les Palestiniens, faisant ainsi des Palestiniens dans leur ensemble des cibles légitimes.

86. Les personnes clairement identifiables comme étant les auteurs de ces actes doivent être poursuivies en justice. Toutefois, c’est l’ensemble de l’appareil d’État qui a conçu, formulé et exécuté la violence génocidaire, par des actes qui, pris dans leur totalité, peuvent conduire à la destruction du peuple palestinien.
Cela doit cesser ; il faut agir d’urgence pour garantir la pleine application de la Convention sur le génocide et assurer une pleine protection aux Palestiniens.

87. Ce génocide en cours est sans nul doute la conséquence du statut exceptionnel et de l’impunité prolongée octroyés à Israël. Israël a violé de manière systématique et flagrante le droit international, y compris les résolutions du Conseil de sécurité et les ordonnances rendues par la Cour internationale de Justice. Cela a conforté l’hubris d’Israël et son mépris du droit international. Comme l’a prévenu le Procureur de la Cour pénale internationale, « si nos actes ne traduisent pas notre volonté d’appliquer le droit de manière impartiale, si notre application du droit est perçue comme étant sélective, nous aurons contribué à son effondrement. Tel est le risque bien réel qui se dessine en ce moment charnière ».
88. Alors que le monde assiste au premier génocide colonial diffusé en direct, seule la justice peut panser les blessures que l’opportunisme politique a laissé s’envenimer. La dévastation de tant de vies fait outrage à l’humanité et à tout ce que le droit international défend.

VIII. Recommandations

89. Le génocide actuel s’inscrit dans le cadre d’un projet séculaire de colonisation de peuplement exterminatoire en Palestine, au déshonneur du système international et de l’humanité, auquel il faut mettre fin et qui doit faire l’objet d’enquêtes et de poursuites.

90. La Rapporteuse spéciale rappelle à tous les États qu’ils ont l’obligation de s’acquitter de leur devoir de précaution, compte tenu du risque grave réel de violation continue de la Convention sur le génocide et des Conventions de Genève, et exhorte les États à examiner les leviers dont ils disposent pour atténuer ce risque et à parvenir sans délai à une décision officielle, qu’ils agissent seuls ou avec d’autres États, y compris dans le cadre de l’ONU ; ainsi qu’à expliquer au grand public et à la communauté internationale les mesures qu’ils prennent et les raisons qui les ont motivés.

91. Que ce soit dans l’exercice de leur devoir de précaution susmentionné ou dans un autre cadre, la Rapporteuse spéciale exhorte les États Membres à :
a) User de toute leur influence politique − en commençant par un embargo total sur les armes et l’imposition de sanctions − pour qu’Israël arrête l’assaut contre les Palestiniens, accepte un cessez-le-feu et se retire complètement du territoire palestinien occupé, conformément à l’avis consultatif de la Cour internationale de Justice du 19 juillet 2024 ;
b) Reconnaître officiellement qu’Israël est un État d’apartheid et qu’il viole constamment le droit international, à réactiver le Comité spécial contre l’apartheid pour qu’il se saisisse de la situation en Palestine, et à avertir Israël qu’il risque d’être exclu de l’Organisation en application de l’Article 6 de la Charte des Nations Unies ;
c) Appuyer le déploiement d’une présence internationale de protection dans l’ensemble du territoire palestinien occupé ;
d) Élaborer un cadre de protection pour les Palestiniens déplacés en dehors de Gaza, conformément au droit international des droits humains et au droit international des réfugiés, tout en préservant pleinement leur droit au retour ;
e) Appuyer la ou les enquêtes indépendantes et approfondies sur les conduites criminelles, y compris le génocide et l’apartheid, notamment par l’application, au sein des juridictions nationales, de la compétence universelle envers les personnes soupçonnées d’avoir commis des actes criminels, y compris toutes les infractions accessoires ;
f) Prendre des mesures d’enquête et de poursuite contre les entreprises et les personnes ayant une double nationalité qui sont impliquées dans des crimes commis dans le territoire palestinien occupé, y compris les soldats, les mercenaires et les colons ;
g) Garantir l’acheminement sans entrave d’une aide humanitaire à Gaza ainsi que le financement intégral et la protection totale de l’UNRWA, y compris contre les attaques visant ses locaux et son personnel et contre les campagnes de diffamation, et assurer la continuité de tous les volets de son mandat.

92. La Rapporteuse spéciale demande instamment au Procureur de la Cour pénale internationale d’enquêter sur la commission des crimes de génocide et d’apartheid par Israël, et d’ouvrir des enquêtes sur d’autres personnalités de premier plan mentionnées dans le présent rapport.

93. La Rapporteuse spéciale demande instamment à la Commission internationale indépendante chargée d’enquêter dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est, et en Israël de mener une enquête sur le contexte plus large des intentions et pratiques exterminatoires d’Israël contre tous les Palestiniens (en appliquant la méthode du triple prisme), y compris ceux qui ont la citoyenneté israélienne et les réfugiés, ainsi que sur les actes récents de génocide.