Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples

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Nous allons procéder à la célébration solennelle du 11 décembre 2022, à la mémoire des 5 victimes du drame

mardi 6 décembre 2022

Rendez-vous à 14H30 H rue des Orfèvres.

Nous nous arrêterons sur les 5 lieux où des personnes ont été abattues.

Et nous nous recueillerons ensuite

  • Rue des Grandes Arcades
  • Rue du Saumon
  • Rue du Savon
  • Pont St Martin

Nous déposerons cailloux, fleurs et pensées.

Nous continuons à essayer de comprendre afin de préserver la liberté d’expression
et le devoir d’hospitalité inconditionnel.

Pour Strasbourg, solidaire et fraternel.

Georges Yoram Federmann

En mémoire de
Pascal Verdenne
Anupong Suebsaman
Kamal Naghchband
Antonio Megalizzi
Bartosz Piotr Orent-Niedzielski, dit Bartek ou Barto Pedro

Et de toutes les personnes touchées par ce drame.

1) Une double peine.

A travers nos engagements professionnels et citoyens, nous avons une expérience certaine de l’accompagnement des personnes victimes de violences extrêmes : rescapés des camps, incorporés de force, survivants de la traversée de la Méditerranée, victimes de guerres ou d’attentats.
Souvent, l’on constate que la douleur morale obsédante et envahissante, celle qui isole et désespère, ne s’éteint jamais tout à fait. Un rien, un bruit, une odeur, une image suffit parfois à réactiver la sidération et le sentiment d’incrédulité.
Souvent, la reprise du cours « normal » de la vie est insupportable car l’esprit et la mémoire restent prisonniers du drame, de ce moment irréductiblement imprimé dans le cerveau, le cœur et le ventre, à l’origine de ruminations incessantes, de nuits peuplées de regrets et de cauchemars où l’on tente désespérément de réécrire l’histoire. On se retrouve alors à côté des autres qui « ne peuvent pas comprendre » et comme « en dehors » de soi-même.
Aujourd’hui encore, on imagine mal toutes ces détresses et ces souffrances chez des hommes et des femmes qui offrent l’image d’une vie pratiquement « normale » et qui vont être trop rapidement considérés comme « stabilisés » par les experts psychiatres et, avec eux, par l’ensemble de la société. Pour certains, l’intégration socioprofessionnelle préservée permet de réguler tant bien que mal les souvenirs de l’horreur. Mais pour beaucoup d’autres, déjà vulnérables, le drame précipite des situations de détresse sociale et psychologique généralement mal comprises, sous-évaluées et peu indemnisées.

2) Besoin d’écoute, de considération et de reconnaissance

Que dire de l’isolement dans lequel se trouvent projetées ces victimes quelques mois ou quelques années après leur drame, une fois celui-ci chassé des mémoires par un nouvel événement médiatique ? Ces hommes et ces femmes se retrouvent alors confrontés à l’oubli et à l’indifférence, sorte de répétition de la violence subie et d’une certaine manière de deuxième arrachement des proches perdus.
Témoins privilégiés des confidences de ces personnes, nous sommes convaincus de la nécessité de nous mettre à l’écoute de leur douleur et de leurs expériences, pour les prendre en considération et leur faire une place dans la société. Les victimes de l’attentat du 11 décembre 2018, comme toutes les autres, ont besoin de reconnaissance (matérielle et symbolique), de célébrations collectives qui réaffirment leur inclusion dans la communauté (et auxquelles elles ont parfois tant de mal à participer) et d’une évaluation équitable de leur préjudice matériel et psychique, ce qui est rarement le cas compte tenu de la tendance de nombreux experts à minimiser les conséquences dévastatrices de ces traumatismes.

3) Devoir de connaissance pour la communauté

Au-delà du travail de reconnaissance que nous devons collectivement aux victimes, nous appelons de nos vœux la mise en place d’un travail de connaissance, utile à toute la communauté, pour regarder l’Histoire en face, intégrer ses enseignements, éviter la banalisation des violences tout comme la répétition de l’horreur.
L’attentat du 11 décembre 2018 comme tant d’autres événements violents doit nous amener à cultiver une vigilance de chaque instant à l’égard de toutes les aspirations au rejet de « l’autre », de l’étranger comme des personnes les plus vulnérables, dont nous voyons combien elles marquent l’actualité politique et notre propre campagne présidentielle.
Quatre ans après, nous continuons à essayer de comprendre, afin de préserver la liberté d’expression et le devoir d’hospitalité inconditionnel.

Georges Yoram Federmann, psychiatre gymnopédiste
Claude Latger, enseignante
Jeanne Teboul, enseignante- chercheuse