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Strasbourg : un prof condamné pour avoir financé un site néonazi. Une avocate représentait le MRAP à l’audience, y a pris la parole.

jeudi 8 octobre 2020

Un membre du comité du MRAP était également présent dans le public.
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Provocation à la haine Strasbourg : un prof condamné pour avoir financé un site néonazi

Un Strasbourgeois de 34 ans a été condamné par le tribunal correctionnel mercredi 7 octobre pour avoir partagé la publication d’un site internet néonazi et lui avoir adressé un don de soutien. Cinq associations de défense des droits de l’homme s’étaient constituées partie civile.

Par Geneviève LECOINTRE - 07 oct. 2020 à 17:59 | mis à jour hier à 13:15 - Temps de lecture : 3 min
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Sur le site internet clandestin Démocratie participative, le trentenaire pouvait se réjouir de la mort de « musulmans brûlés vifs dans un véhicule qui les infiltrait vers l’Europe » ou s’inquiéter de l’immigration des villes et villages de France, de Belgique et de Suisse. Il pouvait lire une prose érigeant Hitler en « héros des droits de l’homme », ciblant à longueur de lignes les juifs, les noirs, les homosexuels.

L’enseignant ne voit toujours pas pourquoi il serait interdit d’exprimer des idées

« Est-ce que vous considérez que ces propos sont tous en conformité avec la loi ? », interroge la présidente du tribunal, Valentine Seyfritz. « J’imagine que non, sinon le site ne serait pas hébergé à l’étranger », répond le prévenu. Ce qui n’empêche pas ce professeur de mathématiques d’y entendre « un ton satirique et pamphlétaire, dans l’esprit français, comme Hara-Kiri, à ne pas prendre au premier degré ».

Au nom de « la liberté d’expression », l’enseignant ne voit toujours pas pourquoi il serait interdit d’exprimer des idées, fussent-elles racistes, antisémites, suprémacistes ou homophobes. « On ne peut pas seulement réclamer des libertés. On a aussi des devoirs de respect de l’autre, quelles que soient ses origines, son orientation sexuelle, sa religion. C’est la base du vivre-ensemble », rappelle la représentante du ministère public, Anne-Gaëlle Breit.
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Pour défendre le site internet, bloqué puis déréférencé en France en 2018 après différentes décisions de justice (*), le Strasbourgeois a répondu à un appel aux dons. « Salut l’équipe, j’ai finalement réussi à vous envoyer quelques euros. Avec tout mon soutien », a-t-il écrit.

Au media d’extrême droite qu’il fréquentait « deux ou trois fois par semaine », il a envoyé l’équivalent de 118 dollars transformés en bitcoins. « Un petit don en douce, en cryptomonnaie pour ne pas être repéré », souligne Me Simon Burkatzki, représentant la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (LICRA).

« C’était un soutien en tant que lecteur, comme quelqu’un qui s’abonne à Charlie Hebdo ou à n’importe quel journal satirique », se défend le prévenu. La loi de 1881 sur la liberté de la presse « engage la responsabilité du directeur de publication, de l’éditeur, de l’auteur, de l’imprimeur, des vendeurs, énumère son avocat parisien Me Benoit De Lapasse pour la défense. Mais où est la mention du donateur ? À partir de quand un abonné devient-il complice de ce qui est publié dans le journal ? »

Des ouvrages antisémites dans sa bibliothèque

Dans sa bibliothèque, les enquêteurs ont noté la présence d’ouvrages du fondateur de la Ligue nationale antisémitique de France Édouard Drumont ou de l’écrivain négationniste Roger Garaudy.

Dans la playlist de son téléphone, ce sont des parodies de chansons aux paroles racistes et homophobes qui ont retenu leur attention. « Il est tellement plongé dans ses lectures, sa démarche est tellement intellectualisée, qu’il ne comprend même pas ce qu’on lui reproche », estime Me Anne Gangloff, représentant SOS Racisme Alsace.

Sur le réseau social VK – le « Facebook russe » – le lecteur a partagé un article visant une nouvelle fois les juifs. « Une initiative malheureuse », reconnaît-il. Non pas parce qu’elle tombe sous le coup de la loi mais parce qu’elle a conduit à son interpellation. « Ce simple fait a provoqué une bombe nucléaire dans ma vie », déplore ce père de famille, inquiet du « déficit d’image » que cet événement a provoqué auprès de ses deux jeunes enfants.

Le tribunal l’a condamné à trois mois de prison avec sursis. Il devra verser 1 500 euros au MRAP, à SOS Homophobie, à la Licra du Bas-Rhin et à SOS racisme Alsace ainsi qu’un euro symbolique au Crif.

(*) Le site Démocratie participative a été bloqué en France en 2018 après réquisition du procureur de la République de Paris. Fin novembre 2018, le tribunal de grande instance de Paris a ainsi imposé aux fournisseurs d’accès à internet de rendre impossible la connexion à cette plateforme, sous peine d’une amende quotidienne de 10 000 euros.