Un film sur-réaliste, un conte tragique, une symphonie chaotique. Les coulisses d’un restaurant newyorkais, huis clos où le personnel malmené est soumis à un rythme inhumain et à un patron despote et dictateur pour lequel seul l’argent, le bruit de la calculette compte. Les sans-papiers resteront sans papier, sans valeur aucune, invisibles, livrés au chantage et au bon vouloir des maîtres ... Esclaves modernes, filmés en noir et blanc, fantômes errants dans les limbes du travail clandestin.
Une cuisine, monde souterrain, où la pression est tellement forte que même la solidarité entre membre du personnel, entre Marocains, Mexicains, (noirs) Américains, … s’efface, où on avorte entre deux services, en vitesse, parce qu’il n’y a pas une minute à perdre ! Une cuisine où chaque petit chef use et abuse de son pouvoir, où chacun essaye d’avoir son propre espace pour respirer, pour asseoir sa propre autorité. Survivre coûte que coûte. Une cuisine qui rend fou et conduit à la crise apocalyptique de Pedro, le cuisinier ambitieux, qui craque, laisse exploser sa rage et ravage tout sur son passage. Couvert de pâtes, de sauce, de débris, de farine, … il n’a plus rien d’humain, il s’échoue tel une épave fracassée, vaincu par le système.
Côté face, la salle de restaurant dans laquelle les gens s’attablent sans se poser de question sans rien suspecter et dévorent leur poulet et leur homard.
Côté pile, une caméra qui sonde les entrailles d’un monstre …
CL
